Avec plus de 4000 exemplaires vendus de L'Africain, son plus récent album, et environ 7000 du précédent Coup de gueule, on savait que l'Ivoirien avait un certain succès chez nous. Mais pas au point de faire de son concert de mardi soir dernier un événement aussi couru. Le Métropolis était encore plus bondé, suintant et dansant pour la visite de Tiken Jah Fakoly que lors de l'ultime concert de la tournée Catherine Ringer chante Rita Mitsouko!
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Avec une douzaine de musiciens sur scène, et lui, magnétique star du reggae africain, le concert, quoique trop court et pas assez généreux en basses fréquences à notre goût, a donné lieu à de véritables débordements d'enthousiasme. Les fans qui dansent en chantant par coeur les paroles de Plus rien de n'étonne et Un Africain à Paris, plus grands succès de l'artiste engagé, les pas de danse des deux superbes choristes rythmés par les ponctions de la section de cuivres, ah oui, la scène était belle. Et force à la réflexion.
La première, la plus importante, touche à l'oeuvre même de Tiken Jah Fakoly, ou à son message, soyons précis.
Ramenons-nous à Bob Marley un instant: l'icône jamaïcaine, la première pop star véritablement internationale (lire: appréciée ailleurs qu'en Occident), avait ce talent subtil pour écrire des textes universellement décodés tout en étant intimement liés à la situation socio-politique de
Tiken Jah
Près de
Cependant, certains autres titres, tous aussi explicites, s'adressent autant à nous, Nord-Américains, qu'à son peuple. Plus tard, au début du rappel, un appel à un sujet particulièrement délicat. Tiré d'Ouvrez les frontières, l'une des plus jolies mélodies de l'artiste, sur une plaintive rythmique one drop: «Ouvrez la porte/Ici on étouffe/On est plein à vouloir du rêve occidental/Ouvrez la porte/Ici la jeunesse s'essouffle»...
Il n'y a rien de léger dans les thèmes de Tiken Jah Fakoly, et pourtant, nous étions des centaines mardi soir dernier à danser jusqu'à notre dernier souffle sur ces rythmiques entraînantes. Le chanteur reggae bouge, danse, court sur scène, mais sa voix est pesante, usée, pas particulièrement jolie, mais intense. Urgente. Nous avons fait la fête, mais en y réfléchissant, elle laisse inévitablement un goût amer.
Ce Tonton d'America qu'il dénonce («On a beau dire mais quand on est nu/Même au Diable on souhaite la bienvenue»), c'est un peu nous, et nos industries bien établies sur le continent africain. Les industries chinoises aussi, raillait-il au rappel: «J'ai lu une manchette qui m'a choqué, a-t-il dit. Durant les Jeux olympiques, les Noirs n'auront pas le droit d'aller dans les bars à Pékin». Et de se lancer dans le rythme, reconnu de tous, d'Un Africain à Paris, emprunté à Sting...
Deuxième et dernière réflexion, plus heureuse celle-là. Le Québec a besoin d'un bon groupe reggae d'ici, il a besoin qu'on l'appuie. Il y a un public pour cette musique, même en français. Celui-ci a rempli à craquer le Métropolis, et c'est franchement l'un des plus beaux publics que nous avons croisés durant cette saison de festivals.
bravo et bon vent l 'Africain!!! ya foy !!!
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